Balade scientifique
Aujourd’hui, je vous propose une balade dans un arrondissement de Paris ayant su garder le charme de petit village, tout comme celui des Batignolles, et qui fut fréquenté autrefois par de nombreux artistes : les poètes Paul Verlaine et Stéphane Mallarmé, le peintre Edouard Manet ou encore les chanteurs Jacques Brel et Barbara.
L’arrondissement où je vous emmène est le 17ème. Tout le monde est prêt? Alors, suivez le guide!
Le 17ème arrondissement, ou arrondissement des Batignolles-Monceaux, est divisé en 4 quartiers administratifs :
- Quartier des Ternes
- Quartier de la Plaine-de-Monceaux
- Quartier de Batignolles
- Quartier des Épinettes
Quelques théâtres et musées, des jardins et squares où il fait bon se reposer, des ambassades en veux-tu en voilà, et la Cité des Fleurs, allée piétonne bordée par de charmantes petites maisons et jardinets : bienvenue dans le 17ème! Des noms de grands savants ont également été groupés dans cet arrondissement, alors, c’est parti pour une promenade parisienne.
Rendez-vous au rond-point de l’Etoile où nous commençons par prendre l’avenue Carnot, du nom du général, mathématicien et physicien Lazare Carnot (1753 – 1823).
Il publia ses travaux scientifiques dans de nombreux ouvrages : Essai sur les machines en général, où il précise les lois du choc, Géométrie de position, où il apparaît, en même temps que Gaspard Monge, comme l’un des créateurs de la géométrie moderne. Il participa d’ailleurs avec celui-ci à la fondation de l’École polytechnique.
Sur notre gauche se trouve la rue Poisson et sur notre droite la rue Torricelli.
Simon Denis Poisson (1781 – 1840) se tourna dans un premier temps vers la chirurgie. Mais les patients qu’il opérait décédant quelques heures après l’intervention, il se tourna vers ce qui s’avéra être sa vrai passion, les mathématiques. Ses travaux portèrent sur les applications en mathématiques à la physique et à la mécanique. Il étudia le mouvement du pendule, l’attraction des planètes et énonça les lois de l’électrostatique. Son Traité de mécanique fut la référence en mécanique pendant de nombreuses années. Il étudia également la théorie des probabilités, domaine dans lequel son nom reste attaché à une loi.
Evangelista Torricelli (1608 – 1647) est un physicien italien qui se fit connaitre par des recherches sur le mouvement des corps. Il est le premier à mettre en évidence la pression atmosphérique et à réaliser le vide, ce qui l’amena à développer le baromètre, instrument scientifique qui sert à mesurer la pression atmosphérique. En son honneur, une unité de pression porte d’ailleurs son nom : le torr.
Tournons à gauche puis tout de suite à droite et nous voici rue Faraday, faisant référence au physicien anglais Michel Faraday (1794 – 1867), dont les travaux concernent essentiellement l’électricité. Sa plus grande découverte est l’induction électromagnétique dont le principe permet de transformer l’énergie mécanique en énergie électrique.
Il démontre également qu’une charge électrique se situe seulement à l’extérieur d’un conducteur chargé, et que celle-ci n’a aucun effet sur ce qui peut être situé à l’intérieur : c’est l’effet de « blindage », également appelé cage de Faraday. Votre voiture est, par exemple, une cage de Faraday qui vous protégera contre les dangers d’électrocution si la foudre lui tombe dessus. Je vous conseille d’ailleurs vivement d’aller au Palais de la Découverte pour voir l’animation sur les phénomènes liés à l’électricité!
Traversons le boulevard Pereire pour arriver rue Bacon puis rue Galvani.
Roger Bacon (1214 – 1294) est considéré comme le père de la méthode scientifique. Il considérait « qu’aucun discours ne pouvait donner la certitude et que tout reposait sur l’expérience ». En optique, il est le premier à étudier l’action des lentilles, à expliquer la formation de l’arc en ciel et à décrire avec précision le mécanisme de l’œil. Il pratique également l’alchimie et l’astrologie. Son œuvre Opus majus est une encyclopédie de la science, comprenant mathématiques, physique, recherche expérimentale et philosophie morale.
Luigi Galvani (1737 – 1798) est un physicien et médecin italien, qui expérimenta les effets de l’électricité sur diverses parties de cadavres d’animaux. En approchant un conducteur électrique des muscles d’une grenouille disséquée, il remarqua leurs contractions. Galvani, frappé de ce phénomène, crut alors qu’il existait une électricité résidant dans l’animal. Il publia les résultats de ses expériences dans sa dissertation De viribus electricitatis in motu musculari. S’en suivit une vive discussion avec Alessandro Volta qui ne croyait pas en une électricité animale. C’est de cette discussion qu’est né le galvanisme, effet lié à la contraction d’un muscle stimulé par un courant électrique.
Direction maintenant la place du Maréchal Juin que nous traversons afin de nous engouffrer dans la rue Ampère, du nom d’André-Marie Ampère (1775 – 1836), célèbre savant français fondateur de l’électromagnétisme. En 1820, il reproduit, devant l’Académie des Sciences, l’expérience du danois Christian Oersted concernant la déviation d’une aiguille aimantée au voisinage d’un courant électrique et en explique la raison en imaginant l’existence de courants électriques à l’intérieur des aimants : c’est l’unification de l’électricité et du magnétisme. Il est également l’inventeur de différents instruments scientifiques tels que le télégraphe électrique ou encore l’électroaimant. Son nom a été donné, lors du premier congrès international des électriciens en 1881, à l’unité d’intensité électrique.
L’impasse qui se trouve à côté prend le nom de rue Charles Gerhardt.
Chimiste français, Charles Gerhardt (1816 – 1856) a obtenu la quinoléine, composé pouvant être utilisé comme désinfectant, conservateur ou colorant alimentaire. Gerhardt a également réussi pour la première fois la synthèse de l’acide acétylsalicylique, que l’on connait tous sous le nom d’aspirine. Cependant, son composé était impur et thermolabile, c’est à dire qu’en élevant la température, il perdait ses propriétés. Sa découverte va alors tomber dans l’oubli jusqu’à ce que le chimiste allemand Félix Hoffmann reprenne ses travaux.
Reprenons la rue Ampère pour aller vers la rue Viète, prenant son nom du mathématicien François Viète (1540 – 1603). Il était avant tout juriste et conseiller privé des rois Henri III et Henri IV et considérait les mathématiques comme un loisir. Il est néanmoins considéré comme l’un des plus grands mathématiciens de son temps. En 1571, il publie un premier ouvrage Canon mathematicus dans lequel il présente de nombreuses formules de cosinus et sinus qui permettent de simplifier les calculs. Il est l’inventeur du calcul littéral, appelé également « logistique spécieuse », méthode transformant les équations afin de les mettre sous une forme plus agréable. Dans une équation, les quantités connues étaient remplacées par des consonnes et les inconnues par des voyelles.
La rue Legendre, qui nous mène vers la rue de Rome près des rails de la gare Saint-Lazare, rend hommage à Adrien-Marie Legendre (1752 – 1833).
Mathématicien, il écrit Eléments de géométrie, ouvrage qui restera une référence dans l’enseignement secondaire pendant plus d’un siècle et qui lui apportera une grande notoriété. Il s’intéressa également à d’autres branches des mathématiques et introduisit de nouveaux outils d’analyse, qui portent toujours son nom. Professeur de mathématiques à l’Ecole Militaire de Paris, il étudie les trajectoires des projectiles dont il appliqua la méthode dans l’étude des comètes.
Nous allons continuer notre chemin à travers cette longue rue afin de croiser la rue Claude Pouillet, la rue Dulong, la rue Nollet, la rue Clairaut, la rue Davy et enfin la rue Lacaille.
Claude Pouillet (1790 – 1868), physicien et homme politique, fut reconnu pour ses grandes qualités en tant qu’enseignant. Il sera professeur à la faculté des Sciences, à l’Ecole polytechnique, puis au Conservatoire National des Arts et Métiers. Il réalise les premières mesures de la chaleur émise par le soleil et obtient la valeur de 1228 W/m², valeur assez proche de l’estimation actuelle, qui est de 1367 W/m². La loi qui porte son nom en électricité, permet de déterminer la valeur de l’intensité dans un circuit électrique simple.
En tant que chimiste, Pierre-Louis Dulong (1785 – 1838) étudie le trichlorure d’azote et l’acide hypophosphoreux et découvre le chlorure d’azote. Cette découverte lui coûtera d’ailleurs deux doigts et un oeil, suite à une explosion… En tant que physicien, il énonce, avec le physicien Alexis Petit, une loi relative aux chaleurs spécifiques des solides, plus connue sous le nom de loi Dulong et Petit.
Jean-Antoine Nollet (1700 – 1770), dit l’abbé Nollet, était un physicien français ayant de grandes qualités d’orateur et de vulgarisateur. Les cours publics de physique expérimentale qu’il donna dans différentes villes (Paris, Bordeaux, Reims, Turin etc.) connurent un grand succès. Il était également célèbre par son art de fabriquer des instruments scientifiques. Il réalisa entre autres deux globes, un terrestre et un céleste, perfectionnera la machine pneumatique à vide, inventa la machine à tailler les verres de lunettes et de nombreux électroscopes permettant de mesurer la charge électrique d’un corps. Dans son œuvre L’Art des expériences, il décrit avec une grande précision la manière de fabriquer les instruments.
Alexis Claude Clairaut (1713 – 1765) était quant à lui un mathématicien qui participa à l’expédition en Laponie afin de vérifier l’aplatissement de la Terre aux pôles. Eh oui, la Terre n’est pas ronde! Grâce à ses calculs mathématiques, il réussit également à déterminer la date à laquelle la comète de Halley sera la plus proche du Soleil : le 13 avril 1759. On appelle cette position « périhélie ». La prédiction de Clairaut va s’avérer être un grand succès, puisque la comète passe à son périhélie le 13 mars 1759, soit pile un mois avant. Il publie alors sa Théorie des comètes.
Humphry Davy (1778 – 1829), chimiste et physicien britannique, réalisa de nombreuses expériences sur les gaz, au cours desquelles il découvre l’effet anesthésiant du protoxyde d’azote. Il le nomme alors gaz hilarant. Grâce à la méthode de l’électrolyse qui permet de réaliser des réactions chimiques grâce à un courant électrique, il isole différents éléments chimiques : le potassium, le sodium, le calcium, le baryum et le strontium. Dans le domaine des sciences appliquées, il invente la lampe de sécurité des mineurs qui les protégeait d’éventuelles explosions.
Enfin, Nicolas Louis Lacaille (1713 – 1762), fut l’élève de Jacques Cassini que nous avons déjà croisé dans le 14ème. Il effectue une mission de plus de 4 ans dans l’hémisphère austral, au Cap de Bonne-Espérance, où il construit un observatoire. Il va ainsi mesurer la position d’environ 10 000 étoiles et d’une quarantaine de nébuleuses (= nuage de gaz et de poussière).
Il est temps de s’éloigner de la rue Legendre afin de découvrir le physicien et abbé Edme Mariotte (1620 – 1684) qui laisse son nom à la rue Mariotte. Il s’est intéressé à la théorie de la vision et découvre le point aveugle de l’œil. En effet, dans chacun de vos yeux existe une petite tâche dépourvue de photorécepteurs, correspondant à l’endroit où le nerf optique et les vaisseaux sanguins quittent l’œil. Ses recherches se portèrent également sur la mécanique des fluides, la théorie de la musique, les couleurs, le recul des armes à feu, etc. En science des gaz, il découvre la loi de compressibilité des gaz en même temps que son contemporain Robert Boyle.
Nous voici au terme de notre balade!
Amélie Cabasse (Voyages au coeur de la Science)
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