Les orties, ça brûle, mais pas que …
– Chiche, le premier qui arrive de l’autre côté a gagné, s’écrie Zoé devant un talus au fond du jardin.
– Ca ne va pas ! C’est plein d’orties !
– Chut, Naël ne sait pas que les orties, ça pique.
Effectivement le petit s’élance, sans plus attendre, profitant que les grands se regardent en hésitant. Et à peine mis un pied dans les orties, ses mains se frottent aux plantes et il crie. Ca brûle, ça gratte. C’est affreux. Apeuré et surpris, il s’arrête et jette les bras en l’air. Heureusement il a un pantalon et des chaussures fermés. Puis reprenant ses esprits quelque peu, il observe rapidement la situation. La destination à atteindre pour gagner le challenge, » l’autre côté », il trouve que, d’un seul coup, c’est beaucoup trop loin. Alors, il se retourne brusquement et s’élance vers sa sœur et son cousin. Surtout vers sa sœur car c’est elle qui a lui a fait cette mauvaise blague.
Il a l’air tellement féroce que Zoé et Vivien s’enfuient sans plus attendre. Ils ont un avantage certain : leurs jambes sont un poil plus longues que celles de Naël. Mais cela n’empêche, celui-ci court de toutes ses forces pour les attraper.
En vain, déjà ils se sont réfugiés dans les jupes de Myriam, qui s’occupe du potager.
– Maman, maman, Naël est tombé dans les orties. Regarde !
Myriam se relève et s’approche de Naël. Il se blottit contre elle, sa chaleur calme quelque peu sa colère.
Après quelques minutes de répit, Myriam ose
– Bon alors, où sont-elles ces orties ?! On va aller en cueillir, on va bien faire attention à ne pas se piquer.
– Non, je veux pas les toucher.
– Je vais le faire, moi. Et puis, on va en faire une très bonne soupe pour ce soir.
– Non, non pas de soupe…
– Pouah, ça doit piquer dans la bouche, pouffent Zoé et Vivien.
– Les orties ne piquent plus quand elles sont cuites. Donc pas de problème pour les manger en soupe, je vous assure. D’ailleurs vous savez pourquoi elles brûlent ?
– Non, non. Dis, pourquoi ?
– Elles sont recouvertes de poils, pointus à leur extrémité, qui s’accrochent à la peau. En s’accrochant, ils se cassent et libèrent des substances chimiques irritantes. On dit que les orties sont urticantes. Elles font parties de la famille des Urticaceae.
– Mais pourquoi elles ont des poils qui piquent ?
– Pourquoi donc à ton avis ? Qu’est-ce qui fait qu’elles se couvrent de poils urticants pour tous les animaux qui s’approchent ? Imagine, Zoé, si tu te couvrais de poils urticants ?
– Naël ne pourrait plus me taper !
– Oui, mais aussi il ne pourrait plus te faire de câlins.
– Les orties ne veulent pas faire de câlins aux animaux ?
– Oui, parce qu’ils peuvent bien vouloir les manger, les brouter comme les vaches par exemple.
– Ah ! C’est pour se protéger !
– Oui. Mais on peut aller les cueillir et les manger quand même. Cuites, elles perdent leur pouvoir urticant.
Plus tard, dans la soirée, toute la famille est attablée. Vivien, le cousin de passage en vacances à la campagne, est bien content de goûter de la soupe aux orties !
Et Thomas le père de famille, en profite pour étaler sa science. Il veut surtout faire bonne impression face au petit de la ville :
– Les orties en soupe, ce n’est pas seulement bon, ça fait aussi du bien au corps. Elles sont pleines de vitamines et de minéraux dont notre corps a besoin. D’ailleurs elles sont aussi utilisées en agriculture pour donner un sol bien fertile dans lequel on peut faire pousser des légumes plus facilement. On les utilise aussi pour la santé, pour améliorer la digestion, et l’élimination des toxines. Ce qui est plus rigolo, c’est qu’on peut la cuire en purée. Appliqué sur la peau, cela permet de réduire les démangeaisons ou certaines douleurs d’articulations. Les orties font mal mais permettent aussi de réduire les démangeaisons ! Rigolo, non ?
C’est là que Vivien surprend tout le monde :
– Avec l’école, la semaine dernière, on a fait une visite. Dans un espèce de musée, il y avait plein de tissus et vêtements. Faits à partir de plein de trucs différents et bizarres. Du café, des oranges, et même qu’il y avait de l’ortie, je me souviens. On s’est tous dit que c’était n’importe quoi. Le maître nous a dit que c’était l’écorce des tiges, et donc que ça ne piquait pas. Je me souviens parce qu’on n’osait pas toucher mais Maxime, il a touché devant nous. Alors, après, on a touché aussi. C’était tout doux.
Effectivement Vivien a raison. Ou presque. Car l’ortie dont il parle n’est pas l’ortie que l’on trouve couramment chez nous. Il s’agit d’une cousine, l’ortie de l’Himalaya, encore appelée allo, ou Girardinia diversifolia en latin.
Comme son nom l’indique, on la trouve dans l’Himalaya où elle est récoltée pour ses fibres.
Avec un kilo d’écorces, on arrive à obtenir environ 400 g de fils, que l’on peut utiliser pour faire des châles par exemple :
La fibre d’allo est de bonne qualité, plus fine, plus robuste et plus élastique que le lin.
L’ortie d’Himalaya ne se trouve pas seulement dans l’Himalaya, mais dans plusieurs autres zones, tropicales ou subtropicales, où le climat est humide et ombragé, comme dans certaines régions d’Afrique, Sénégal, Angola, ou au Madagascar.
Nous avons vu que l’ortie, au premier contact fort peu sympathique, sert en fait à plein de choses.
Elle est très utile pour soigner les douleurs d’articulations, stimule l’organisme. Elle contient également de nombreux minéraux et des vitamines, elle est donc excellente pour la santé. Et puis, utilisée comme un engrais, elle permet de mieux faire pousser les légumes.
Enfin, on peut extraire de l’ortie d’Himalaya une fibre avec laquelle on fabrique des vêtements.
L’ortie est donc beaucoup plus sympathique qu’elle paraît !
Tu pourras trouver d’autres exemples de tissus originaux sur cet article de blog: http://lemondeetnous.cafe-sciences.org/2016/01/des-textiles-pas-ordinaires-partie-ii/
Auteur : Emilie, SenseThe Science
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