Les sapins sont grands !

La plupart des végétaux produisent des graines mais pas tous ! (regarde les algues et les fougères par exemple, elles se reproduisent par d’autres processus dont nous parlerons dans un autre article). Dans ce groupe, une grande majorité sont des plantes à fleurs qui donnent des fruits contenant les graines, on les appelle les Angiospermes (Angio signifie « vase, réceptacle » et sperme signifie “graine”). Mais il y a aussi des plantes à graines qui ne produisent pas de fleurs : les graines sont donc “nues” c’est-à-dire non contenues dans un ovaire, on les appelle les Gymnospermes (Gymno signifie “nu”) ; elles sont apparues sur Terre il y a plus de 300 millions d’années, bien avant les plantes à fleurs (apparues, il y a environ 130 millions d’années). On recense actuellement environ 1000 espèces de plantes gymnospermes ce qui est peu comparativement au 300 000 espèces des plantes angiospermes ! Pourquoi cette différence ? C’est une question de taille de génome c’est-à-dire l’ensemble des gènes et d’évolution ! On va t’expliquer pourquoi…

Caractéristiques des gymnospermes
Parmi les gymnospermes, nous trouvons par exemple les conifères : pins, sapins, épicéas, mélèzes, séquoias, ifs, cyprès mais aussi quelques rares végétaux à plus grandes feuilles comme le Ginkgo. Laissons-nous porter par la période de l’année… On est en hiver (ici dans l’hémisphère Nord) et on sort tout juste de la période de Noël… Alors ferme les yeux et pense à ces arbres, toujours verts, en particulier les sapins, les séquoias… Tu les imagines ? Tu les vois ? Ils sont grands et robustes, capables de vivre sans trop de problèmes dans des environnements difficiles, n’est-ce pas ? Là, aussi, c’est une question de génome et d’histoire évolutive.

Figure-toi que des recherches récentes se sont penchées sur la question et le génome complexe de plusieurs espèces de ces Gymnospermes a pu être décortiqué.

A l’université d’Arizona à Tucson, des scientifiques du département d’écologie et de biologie évolutive ont découvert en 2015 que ces espèces avaient fait l’objet, au tout début de leur histoire évolutive (il y a 350 millions d’années), d’une duplication de leur génome et que cela avait joué un rôle dans leur évolution ! Jusqu’ici, on pensait que ce phénomène de duplication concernait uniquement les plantes à fleurs dont le génome est mieux connu.

Beaucoup plus récemment encore (2021), une autre équipe a montré que de multiples duplications de génome s’étaient produites plus tard dans l’histoire de ce groupe ce qui a permis aux espèces d’évoluer en se dotant de caractéristiques uniques leur permettant de mieux résister à des conditions d’environnement variables (comme par exemple un climat qui change) avec l’apparition de nouvelles espèces..  

Qu’est-ce donc qu’une duplication du génome ?
Le génome, comme on l’a expliqué plusieurs fois, est l’ensemble des gènes, les morceaux d’ADN contenant des informations capitales pour la construction et le fonctionnement d’un être vivant. Au cours de l’évolution, selon les conditions de vie, plus ou moins stressantes, les cellules végétales sont capables de “doubler” des portions d’ADN sans remettre en question leur survie, bien au contraire. Ainsi, certains gènes sont présents en plusieurs exemplaires dans les cellules. Parfois, c’est le génome entier qui est dupliqué, on parle alors de plantes polyploïdes.

Cette “intensification du génome” est un atout précieux car cela ouvre la voie à des mutations qui conduisent à de nouvelles caractéristiques souvent favorables comme une meilleure résistance à un environnement stressant. Il est alors plus facile pour ces arbres de résister à des maladies, des pathogènes ou de mieux tolérer la sécheresse…

Un phénomène très répandu chez les plantes à fleurs, moins chez les gymnospermes
Beaucoup de connaissances ont été accumulées sur les plantes à fleurs et la duplication de leur génome dans leur histoire évolutive est bien documentée : elle a conduit à une forte diversité des espèces. Ce phénomène chez les gymnospermes semble être plus rare mais aussi moins étudié dans la mesure où leur génome est immense et complexe donc difficile à séquencer. Les nouveaux résultats (à savoir une duplication qui s’est produite très tôt dans l’histoire évolutive et qui s’est réitérée plusieurs fois) rebattent les cartes et expliquent pourquoi le génome des conifères est très grand (un génome 8 fois plus grand que celui de l’Homme pour le Pin maritime par exemple !). Cela a vraisemblablement eu pour effet de leur donner cette caractéristique d’arbres très grands et robustes, capables de vivre dans des conditions extrêmes.

Citons le cas du Pin des marais originaire du sud-est des Etats-Unis, particulièrement résistant au feu !

Les menaces
Pourquoi un tel enthousiasme à vouloir décrypter le génome assez complexe et l’histoire évolutive des grands arbres ? Tout simplement parce que malgré leur grandeur, leur robustesse, certaines espèces (et la riche biodiversité qui y est liée) sont menacées notamment en raison de la double pression du rapide changement climatique et ses conséquences, et de la déforestation et surexploitation. Ainsi, mieux comprendre les mécanismes génétiques leur permettant de mieux résister aidera à mettre en place les conditions propices à leur survie !

Références :
https://www.inrae.fr/actualites/nouveau-modele-evolutif-du-genome-coniferes
https://www.floridamuseum.ufl.edu/science/gymnosperm-origin-evolution/
https://www.studysmarter.fr/resumes/biologie/information-genetique/duplication-genique/

Texte : Pascale Baugé (Le Monde et Nous)

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