Danger et risques de la radioactivité, comment les mesurer ?

Voici un nouvel épisode de notre dossier consacré à la radioactivité.
Aujourd’hui, on va t’expliquer comment on la mesure ce qui te permettra de mieux comprendre les différentes situations où tu es confronté au phénomène.

Comme on l’a expliqué dans le premier épisode, le noyau d’un atome radioactif va avoir tendance à se réorganiser : c’est ce qu’on appelle la désintégration. Ainsi un matériau ou un environnement contenant des atomes radioactifs va émettre un rayonnement lorsqu’un de ses noyaux instables va se désintégrer. Pour mesurer cette propriété, il suffit donc de « compter » le nombre de désintégrations par seconde. Le résultat est donné en Becquerels (noté Bq) en l’honneur du célèbre physicien Henri Becquerel qui a découvert la radioactivité en 1896 (nous en avions parlé dans ce billet).

En toute rigueur, la radioactivité ne se voit pas à l’œil nu ! Voir le paragraphe suivant « Comment compter ? »

On a donc 1Bq=1 désintégration par seconde.

A quoi cela sert-il ?
Nous avons vu aussi que le rayonnement émis peut pénétrer la matière et agir sur elle ; il est donc potentiellement dangereux pour nos cellules et nos organes : on dit que le rayonnement est ionisant.
Pouvoir compter les désintégrations permet d’estimer « la dangerosité » d’un matériau ou d’un environnement : il est donc intéressant de connaître la radioactivité d’un brin d’herbe, de l’air ambiant, du lait que tu bois ou de la mer dans laquelle tu te baignes, ou de ton propre corps. Souviens-toi que, absolument tout, dans ce qui nous entoure, contient un peu de radioactivité.

Comment compter ?
Pour mesurer la radioactivité, on utilise en général un compteur « Geiger » qui permet de détecter la désintégration. On parle aussi de compteur « Geiger-Müller » du nom des deux physiciens (Hans Geiger et Walther Müller) qui ont mis au point cet outil.
Pour faire simple, on peut dire qu’il s’agit d’un tube, rempli d’un gaz (l’hélium). Lorsqu’un rayonnement le traverse, cela modifie l’état des atomes d’hélium ce qui crée une décharge électrique au sein du tube : cette perturbation est facilement mesurée, elle traduit chacune des désintégrations issues des atomes de l’échantillon radioactif.

Crédit  Svjo-2 – Travail personnel, CC BY-SA 3.0, Lien

La radioactivité dans notre environnement
On rapporte en général la mesure de la radioactivité par unité de volume ou de masse.
Par exemple, le lait a une radioactivité de 70 à 80 Bq/l (à cause du potassium 40K qu’il contient), ou l’eau de mer autour de 14 Bq/l en moyenne (essentiellement à cause des éléments comme le potassium 40K, mais aussi le thorium et l’uranium  232Th, 235U and 238U).

La radioactivité de l’air est comprise entre 1 et 100 Bq/m3. La fourchette est large car cela dépend de l’endroit où tu te trouves bien sûr.
Le granit (qu’on trouve en assez grande quantité dans certaines régions) affiche des valeurs comprises entre 3000 et 8000 Bq/kg.
Les sols sédimentaires sont autour de 1000 Bq/kg.

Et nous, là dedans ? Notre corps contient (à cause du carbone 14C et du potassium 40K que nous absorbons par notre nourriture) un niveau de radioactivité de l’ordre de 130 Bq/Kg.
Cette mesure est-elle suffisante ?
L’activité, celle qui est mesurée par le compteur Geiger est une chose, mais ce qui importe surtout c’est l’effet qu’un rayonnement va produire sur la matière et notamment sur un organisme vivant. Il est alors légitime de se poser les questions suivantes :
Un rayonnement issu d’une désintégration va-t-il atteindre la matière qui te compose ? Va-t-il pénétrer profondément dans l’organisme ? va-t-il être arrêté facilement ? Certains tissus vont-ils être plus touchés que d’autres ?

L’activité (Bq) ne renseigne pas sur les effets possibles d’un rayonnement sur l’organisme. D’une part, tous les rayonnements ne vont pas forcément atteindre une cible, et d’autre part tous ne vont pas pénétrer de la même manière dans les tissus d’un organisme vivant.
Par exemple, lorsque tu es exposé au soleil, selon l’heure de la journée, le temps que tu passes face au soleil et les vêtements que tu portes, les effets vont être différents. Tu prendras plus ou moins de coups de soleil !
Pour les effets des rayonnements ionisants, c’est un peu la même chose.

La mesure des doses
Ainsi il faut une autre échelle, pour vraiment quantifier les effets sur le vivant. Ce qui compte, c’est la dose reçue ,le type de rayonnement émis (plus ou moins pénétrant) et le temps passé dans un environnement. On parle alors de « débit de dose » lorsqu’on s’intéresse à la dose reçue par heure ou par seconde.
L’unité employée pour la dose équivalente (la dose reçue multipliée par un facteur de gravité selon le type de rayonnement) est le Sievert. C’est l’énergie effectivement reçue pour une certaine masse, en tenant compte de l’effet biologique (type de rayonnement alpha, beta ou gamma) et des organes plus ou moins sensibles. On utilise en général un multiple du Sievert comme le millisievert (mSv) ou microsievert (µSv).

Le débit de dose sera donné en Sievert par heure ou par seconde (Sv/h ou Sv/s).  Connaître ces valeurs, pour différentes situations, est important car elles vont pouvoir servir de base à la radioprotection et la réglementation.

Prenons un autre exemple : des pommes tombent d’un arbre ! C’est l’image de la désintégration (mesurée en Bq)… Mais si tu es sous l’arbre, seules certaines pommes vont te tomber dessus, et si elles te tombent sur la tête, ce sera plus problématique que si elle te tombaient sur le pied !
Quelques valeurs pour se situer
En France, les populations sont soumises à des doses de radioactivité naturelle et artificielle (par exemple lors d’un examen médical) de l’ordre de 3,7 mSv/an (dont 2,4 mSv/an en raison de l’environnement par exemple l’air, le sol et les roches).
Selon la localisation géographique, les doses efficaces reçues sont variables : en Bretagne, la dose est de 0,6 mSv/an tandis qu’en montagne à 1500 m d’altitude, la dose est autour de 0,8 mSv/an (en Bolivie à 3600 m d’altitude, on est plutôt aux alentours de 2 mSv/an).
Une radio des poumons va t’exposer à une dose de  0,05 mSv, un scanner abdominal à 12 mSv et un vol Paris-New York à 0,06 mSv.

Des effets notables sur la santé sont prouvés à partir d’une dose de 100 mSv. En dessous, les effets ne sont pas constatés de façon claire mais de nombreuses recherches sont lancées sur la question.
Sur cette base, des règles ont été établies par la Commission Internationale de Protection Radiologique et imposent que la dose reçue par les populations (en plus de la radioactivité naturelle) ne dépasse pas 1 mSv par an et 20 mSv pour les personnes travaillant dans un milieu proche de sources radioactives (industrie nucléaire ou milieu médical).

Pour en savoir plus :
https://www.sfmn.org/images/pdf/GroupesDeTravail/GT_Radioprotection/Irradiation_naturelle_en_10_episodes.pdf
https://www.futura-sciences.com/sciences/dossiers/physique-radioactivite-phenomene-physique-1-3-761/page/8/
http://www.laradioactivite.com/site/pages/Alimentation.htm

Auteur :
Pascale Baugé, du blog Le Monde et Nous

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