Et la biodiversité alors ?

La biodiversité, c’est l’ensemble très riche et très varié des espèces vivantes sur Terre.
Comme on l’a expliqué dans les épisodes précédents, le réchauffement climatique a des répercussions notables sur les glaces, les mers et les continents. Comment réagissent les êtres vivants à cette modification si rapide ? A-t-on déjà constaté des changements ? Que va-t-il se passer sur le long terme ? Certaines espèces vont elles souffrir, disparaître, résister, modifier leur comportement, leurs caractéristiques ou leur aire de répartition ou au contraire en tirer profit ? Bref, comment va évoluer la biodiversité ?
Nous ne présenterons ici que quelques exemples des effets du réchauffement sur la vie (ou la survie) des espèces peuplant notre Terre.

La vie marine

Les êtres vivants en mer sont déjà perturbés en raison de la modification de trois paramètres importants :

  • la température qui augmente,
  • l’acidité des eaux qui s’accroît ; la teneur en CO2 augmentant, sa dissolution dans les océans est plus importante et l’eau devient plus acide (nous l’avions expliqué ici).
  • la teneur en oxygène dissous qui diminue (la solubilité de l’oxygène dans l’eau s’affaiblit lorsque la température augmente et le brassage entre les eaux de surface et les eaux plus profondes à tendance à ralentir).

Ces trois facteurs peuvent d’ailleurs avoir un effet combiné particulièrement stressant sur certaines espèces, et également s’ajouter aux problèmes de pêche intensive et de pollution.

Les coraux
On a bien sûr rapidement en tête, à juste titre, l’exemple des récifs coralliens avec l’un des plus célèbres, la grande barrière de corail au large des côtes d’Australie. Ils souffrent d’ores et déjà à cause de l’augmentation de températures et de l’acidité croissante et environ 20 % sont actuellement détruits.

Certains deviennent tous blancs et ce n’est pas bon signe pour leur survie.
Les coraux vivent en symbiose (cela signifie qu’ils vivent ensemble et coopèrent dans une relation donnant-donnant) avec des petits organismes microscopiques (par exemple des petites algues appelées zooxanthelles notamment dans les mers chaudes). Ce sont eux qui leur donnent leur couleur mais également de l’oxygène et des nutriments.

Lorsque la température s’élève (et moins de un « degré » en plus, peut faire toute la différence), la cohabitation corail-micro-algues est rompue : le corail rejette ses hôtes et blanchit ; il finit par souffrir d’un manque de nourriture. D’autres causes (pollution, surpêche…) sont aussi avancées pour expliquer l’expulsion des  zooxanthelles.
L’acidité croissante (une augmentation de 30 % a été observée dans certaines zones) est également préjudiciable pour la tenue du squelette composé essentiellement de calcaire (on parle d’exosquelette car contrairement au-nôtre qui est interne, le squelette est ici la partie dure et externe qui protège l’animal). Certaines espèces de coraux n’ont pas la capacité de résister.

corail DEF

Par effet boule de neige, les espèces marines qui trouvent refuge au sein des récifs coralliens seront elles-aussi impactées.

Les autres espèces marines ou côtières
De façon générale, toutes les espèces qui fabriquent une carapace dure telles que certains homards, crabes ou coquillages sont donc menacés par l’augmentation de l’acidité des océans.

L’impact de la température sur les espèces marines se manifeste par exemple par une modification de la croissance, du comportement, du lieu de vie, de l’alimentation et la reproduction. Tout simplement parce que chaque espèce est adaptée à des caractéristiques données du milieu de vie.

En général, la faune marine se déplace vers le nord (exemple des anchois ou de maquereaux en Islande) : le déplacement est plus facile que pour les espèces terrestres grâce aux courants océaniques.

Poissons_morts

Dans une région donnée, on assiste donc à une modification complète des espèces présentes. Et cela modifie nécessairement l’équilibre des écosystèmes (les différentes espèces et leur environnement) par exemple les chaînes alimentaires c’est-à-dire les relations entre proie et prédateurs ou les réseaux trophiques (ensemble de chaînes alimentaires interconnectées) : certains ne se rencontrent plus ou de nouvelles proies deviennent accessibles pour certains prédateurs.

Le réchauffement des océans constaté ces dernières décennies a également modifié fortement les courants marins (on l’a vu ici), conduisant à une baisse d’intensité des courants verticaux : or ceux-ci sont primordiaux car ils ramènent vers la surface les nutriments présents dans les profondeurs. On constate ainsi une diminution de la présence de phytoplancton dans certaines régions (il se déplace). Or, le phytoplancton est  premier maillon de la chaîne alimentaire marine, d’où la désertification complète de certaines régions. Cela dépasse même le cadre de la mer puisque des espèces d’oiseaux marins voient s’éloigner (ou même disparaître) leur nourriture à cause de la modification de zone de répartition des poissons qu’ils consomment. Ces oiseaux sont véritablement menacés d’extinction.

Le guillemot, espèce d’oiseau de mer, menacé par le manque de nourriture (mais également par les activités humaines et leurs conséquences telles que la pollution -pétrole ; plastique-, la chasse et la surpêche)

Enfin, la diminution de la teneur en oxygène dissous (on parle de zones hypoxiques) a un impact sur les fonctions biologiques des espèces (c’est-à-dire l’ensemble des processus qui leur permettre de vivre, de se développer etc.). On constate par exemple que les bars, sont de plus petite taille et que cet effet s’accentue de génération en génération. Réussiront-ils toujours aussi bien à échapper à leurs prédateurs ?

Des espèces s’épanouissent et deviennent invasives
Certains microorganismes sont au contraire parfaitement à leur aise dans des eaux plus chaudes : on assiste à une multiplication impressionnante de virus ou de bactéries qui s’attaquent alors par exemple aux huîtres ou moules ou coquilles Saint-Jacques…
De plus l’explosion de micro-organismes augmente la consommation d’oxygène par le mécanisme de la respiration ce qui accentue l’étendue des zones hypoxiques.

micro organismes

En tous cas, il faut en prendre conscience : la perte de biodiversité est en partie à cause de nous les hommes et de nos activités. Nous avions déjà parlé de ce sujet dans un précédent article que nous t’invitons à relire pour l’occasion.

Dans les zones humides

L’assèchement des lacs, des marais consécutivement au réchauffement va priver certaines espèces de leur lieu de vie habituel mais aussi de leurs ressources en eau.
On constate par exemple un déclin important des amphibiens (on avait parlé des grenouilles dans ce post). Les scientifiques pensent que plusieurs facteurs sont en cause mais le réchauffement climatique y joue un rôle certain.
Le crapaud doré par exemple a été déclaré espèce éteinte depuis 2001.

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Le crapaud doré (espèce disparue)

Citons également le cas de la Tortue peinte qui chasse dans les marais et qui se trouve menacée, d’autant plus que cette espèce produit des œufs qui écloront en femelles ou en mâles selon les conditions de température. Si la température augmente trop, on risque une prédominance marquée d’un sexe sur l’autre.

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Tortue Peinte – « Eastern Painted Turtle (Chrysemys picta picta)» par Greg Schechter « 

Les espèces sur Terre

Beaucoup d’espèces migrent progressivement là où il fait plus frais de façon à retrouver leurs conditions de vie idéale. Ainsi, pour gagner un habitat plus frais, les espèces doivent parcourir plusieurs dizaines de kilomètres ou monter en altitude.

Une autre problématique fait surface : celui du décalage du calendrier entre les besoins de certaines espèces et les ressources disponibles.
C’est le cas par exemple de la mésange charbonnière : avant le réchauffement, ses oisillons trouvaient facilement leur pitance (pic de présence des chenilles). Les petits se trouvent désormais fort dépourvus car les chenilles apparaissant plus tôt (à cause des températures plus clémentes) et sont déjà transformées en papillons.
Mais les scientifiques étudient et enquêtent et il semble qu’il y ait bel et bien « adaptation » dans l’air : la mésange semble pondre plus tôt.

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En ce qui concerne les espèces végétales, la mobilité est plus difficile. Pas mal d’espèces sont donc menacées d’extinction. Pour d’autres, leur croissance et leur développement sont ralentis : c’est le cas du blé et du maïs (voir l’article précédent).

Des espèces qui s’adaptent mais qui font surgir d’autres problèmes

Certaines aussi profitent admirablement du réchauffement : notamment les espèces invasives ce qui peut également devenir une menace pour les écosystèmes. Parmi les espèces végétales, la Berce du Caucase est une espèce considérée comme invasive et menaçante pour la biodiversité.

Citons également le cas du moustique tigre, d’origine tropicale, introduit en Europe depuis quelques années et s’y adapte parfaitement pour cause des températures plus élevées à ces latitudes. On en sait quelque chose !

Bref, un large éventail d’effets du changement climatique sur la biodiversité est à l’œuvre. Un travail énorme est en cours par les chercheurs qui doivent multiplier les études permettant de déterminer quelles sont les espèces menacées. Mais prédire ce qui pourrait se passer pour la biodiversité reste un exercice difficile car beaucoup d’interactions existent entre les espèces.

Texte : Pascale du blog Le Monde et Nous
Illustrations : Alain Prunier du blog Koua de 9

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